Je veux rentrer chez moi

Rentrer chez soi ? Quelle idée ! Tout le monde pense le contraire pendant le confinement, dans les appartements des villes : quand est-ce qu’on sort ? Si à l’hôpital les malades infectés souhaitent survivre avant de savoir où,     Je veux rentrer chez moi, dernier roman de Dominique Fabre, paru en 2019, chez Stock, explore la vie de Richard, à l’hôpital, atteint d’un cancer incurable, qui s’accroche à ce désir de rentrer chez lui, même si c’est une chimère…

 

Richard était le modèle du narrateur, leur amitié, « une boussole », il savait draguer, à l’aise dans la vie, cancre au lycée, fumant des joints, allant et venant, se piquant hélas… Lors de chacune de ses visites à l’hôpital, il essaye de lui dire qu’il fut son phare, mais comme ils avaient l’habitude d’être ensemble sans éprouver le besoin de se dire grand-chose, ils continuent…

 

« On se croit toujours plus ou moins important qu’on ne l’est vraiment dans la vie des autres. Les autres font de longs chemins sans nous, et finalement, un jour, on se rejoint sans crier gare, comme si c’était prévu depuis toujours, comme si c’était fait exprès. »

 

Une galerie d’amis, dont Pascal, Nathalie, traverse le roman ; les souvenirs remontent ; Pauline, la fille de Richard, est la prunelle de ses yeux, alors même qu’il ne peut plus parler, peu importe, ils se regardent…

 

Comment nous regardons-nous quand nous nous croisons furtivement le temps des courses de première nécessité, à moins d’y aller incognito avec masque, chapeau et lunettes noires ?

 

Le confinement nous laisse le téléphone ; mais si le coronavirus s’attaque à notre premier cercle, nous n’irons pas le voir à l’hôpital ; Richard atteint ainsi, vivrait ses derniers jours très entouré par l’équipe soignante, sans sa fille ni personne autour de lui ; Dominique Fabre aurait écrit un autre livre.

 

Écrivain méconnu à tort, né en 1960 à Paris, il a une douzaine de romans au compteur ; il est toujours professeur d’anglais. Je veux rentrer chez moi est sur les rayons des librairies mais pas les précédents (1) ; ainsi va la vie de tant d’écrivains…

 

Dominique Fabre a publié, en 1995, son premier roman       Moi aussi, un jour, j’irai loin, en même temps que Houellebecq, chez le même éditeur Maurice Nadeau.

 

Il a vu Houellebecq faire le siège de l’éditeur qui se cachait pour échapper à ses visites incessantes… Les deux écrivains choisissent des anti-héros, l’un plus sobrement que l’autre ; inconditionnel de Houellebecq, je trouve chez Dominique Fabre la preuve que l’excellence n’implique pas toujours le succès !

 

Profitons du confinement pour lire ses livres qui nous emmènent entre les lignes de la vie où seuls les grands écrivains sont à l’aise.

 

(1) Mais il est facile de les commander, en évitant Amazon : https://www.lalibrairie.com/

Outre Je veux rentrer chez moi, je vous recommande J’aimerais revoir Callaghan, paru chez Fayard en 2010,        qui ressemble à son dernier, l’hôpital en moins.

 

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