Quand l’encre lève l’ancre

Si l’encre est ancrée dans la tradition picturale chinoise depuis plus de 2500 ans avant notre ère, ce sont des peintres contemporains chinois utilisant l’encre, que nous invite à découvrir l’exposition L’encre en mouvement actuellement au musée Cernuschi.

Liserons rouges de Qi Baishi nous accueille ; parmi les fleurs, deux font les yeux au-dessus du pull taille enfant perché en haut d’un amoncellement de taches noires et grisâtres ; quelle légèreté, puisqu’ici rien ne pèse…

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Les Lotus sous le vent de Zhang Daqian apportent, avec leur blanc, la touche de délicatesse, derrière les feuilles en dégradé de gris qui semblent énormes, magie du gros plan ; par contre le lotus est un grand arbre.

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Zao Wou Ki est le plus connu d’entre tous ; Sans titre, a des airs de Simon Hantaï.

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Le Cheval de Xu Beihong est totalement aérien, Pégase peut aller se rhabiller, ce cheval vole sans ailes ; un arrêt sur image qui est le rêve de tous les turfistes !

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Les peintres chinois sont venus découvrir en France l’esthétique occidentale, d’où le « mouvement » du titre de l’expo, dont les irrésistibles nus ; Pan Yuliang commence par des silhouettes jusqu’à ce chef-d’œuvre de sensualité        Nu assis au qipao rouge : y-a-t-il une meilleure raison de lever l’ancre ?

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A la fin de l’exposition, Sans titre de Ma Descheng offre un rivage rocheux avec embruns, des pierres dans le désert, avec poussière, une lumière éblouissante…

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Frontière entre réel et abstraction, fenêtre ouverte sur le territoire de la Poésie, ce continent qui échappe à la géographie…

Ma Descheng, né en 1952, est l’un des fondateurs du Groupe des Étoiles ; son travail est actuellement visible au centre Pompidou, au 4ème étage, dans la salle 20 de la collection permanente.

Une dernière pour la route Tout est possible de Yang Jiechang, juste à côté de la précédente ; ici encore les formes sont tellement évocatrices…

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Le cartel annonce du mauvais goût car l’encre a bavé. À moins que cela soit justement un des nouveaux goûts vers lesquels tendent tous ces artistes !

L’exposition L’encre en mouvement a lieu au Musée Cernuschi, ça on a compris, mais qui est cet homme ?

Enrico Cernuschi (1821-1896) est député en Italie, banquier en France ; il soutient le journal Le Siècle de son ami Gustave Chaudey, dont les positions troubles pendant la Commune le font fusiller ; comme Cernuschi risque aussi d’y passer pour avoir voter contre le plébiscite de Napoléon III, il prend la tangente en voyageant au Japon et en Chine pendant deux ans ; il rapporte 5000 objets d’art qu’il installe dans son hôtel particulier, avenue Vélasquez, construit pour l’occasion ; c’est fou comme parfois, les choses s’enchaînent !

C’est là qu’il organise la première fête éclairée à l’électricité, pour laquelle il revêt cette petite broche turquoise dans la tignasse…

Et puis, il éteint la lumière après avoir légué l’hôtel « garni » à la Ville de Paris ; il souhaite que le musée porte son nom ; c’est fait !

Ce qui ne l’est pas encore, mais tout arrive : Joyeux Noël !

 

  1. Très belle histoire que celle de Cernuschi, qui montre combien les contraintes peuvent être créatrices, (ici son nécessaire exil) ce qui s’est vérifié tellement de fois que ce n’est plus à démontrer. Ainsi Georges Perec ne s’est-il pas exercé à écrire « La disparition », un roman époustouflant dont il s’est contraint à supprimer la lettre « e » ? Soulages et Klein à créer essentiellement avec une seule couleur ? Et la vie elle-même n’est-elle pas si créatrice que lorsque nous prenons conscience de sa mortelle limite ?

  2. liserons rouges… et ta photo de Zao Wou Ki du  » Sans titre »… le met en valeur !! regard photographié , bravo
    merci pour l’info , on a pu voir l’expo du coup; ouf !

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