Kupka, Kupka, Kupka !

Kupka Frantisek (1871-1957). Etats-Unis, New-York (NY), The Solomon R. Guggenheim Museum.

À Paris, il y a beaucoup d’expositions en ce moment : Corot, Tintoret, Fautrier, L’avant-garde russe, et j’en oublie…

 

Kupka passe avant ! Kupka, Kupka, Kupka ! Précipitez-vous voir cette exposition au Grand Palais avant qu’il n’y ait la queue, même si je doute qu’il y ait un jour la queue (1). Kupka est un immense peintre, un géant de la peinture, tout cela est en dessous de la réalité, mais il n’est pas (encore) un monstre sacré (2) comme Picasso, Monet ou Dali…

 

Frantizek Kupka (1871-1957), peintre tchèque, l’un des pionniers méconnus de l’abstraction, n’avait pas envie d’être considéré comme une peintre abstrait, même s’il écrivait :   « Je peins, oui, mais seulement des conceptions, des synthèses, des accords. »

 

C’est cela, qui est incroyable, malgré une telle déclaration, sa peinture est sensuelle, spectaculaire, variée, inventive, festive, jouissive…

 

Dans les premières salles du Grand Palais, on découvre qu’il a beaucoup dessiné pour l’Assiette au Beurre ; sorte de Hara-Kiri du XIXe siècle même si Cavana refuse l’héritage…

 

Soudain ce Grand nu, plans par couleur ! Vision de rêve ! Pas étonnant que dans une salle précédente, on ait vu le portrait de Baudelaire d’un jaune aveuglant (3).

 

Viennent les grands formats abstraits colorés : des cercles partent d’un point et s’enfoncent dans la toile ; des courbes gigantesques nous embarquent dans l’espace…

 

Puis les courbes le cèdent aux verticales, avec cette vision de hall d’hôtel au plafond très haut d’où pendent des lustres très longs ; des visions de cathédrales, où des vitraux apparaissent, rentrant les uns dans les autres (4).

 

Enfin il représente des machines qu’il compare à des cathédrales : « Dans une machine, une presse rotative par exemple, il y a les mêmes éléments que dans une cathédrale gothique, les verticales, horizontales et les cercles y dominent dans les deux, c’est l’ordonnance qui n’est pas la même. » La comparaison est celle d’un ingénieur qui considère l’aspect de ce qu’il voit avant sa fonction.

 

Reliant les deux niveaux de l’exposition, un escalier en spirale à des parois en plexiglas qui reflètent les marches ; on a l’impression d’être dans une peinture de Kupka…

 

Dehors la vision de cette femme nue allongée sur le canapé enivre encore (5) ; Kupka est un poète comme L’Albatros de Baudelaire ; ces ailes de géant l’empêchent de la rejoindre. C’est peut-être pour cela que de telles peintures existent ; pour se consoler.

 

(1) Précipitez-vous pour voir des merveilles de peintures non pas pour éviter la queue mais pour hâter votre voyage dans cet ailleurs où tout est si bath.

 

(2) Si sa peinture est vue et appréciée par une foule de gens, tout va changer, la poésie va descendre dans la rue, prendre le métro ; la grande roue de la Concorde va avoir beaucoup de succès ; elle offre un vertige comparable aux grandes toiles de Kupka : essayez, vous verrez…

 

(3) Imaginons le compagnon de la femme nue ainsi.

 

(4) Les espaces picturaux de Kupka ne renvoient à rien de réel ; voilà pourquoi c’est un peintre sublime.

 

(5) Vous je ne sais pas, moi…

Les commentaires sont fermés.